LES SILENCES DE DIEU
Prédication du Pasteur Jacques Poujol
Je vous propose ce matin de nous arrêter ensemble sur le silence de Dieu dans notre vie et parfois dans nos communautés.
Mais avant de parler du silence, que les choses soient très claires pour nous : je crois et nous croyons tous, nous le confessons, le christianisme est la religion de la Parole. Je crois que Dieu parle en Jésus ; par son Esprit, il nous parle. Je crois que la Bible est la Parole de Dieu, je crois que Dieu guide son peuple par sa Parole. Nous écoutons la Parole et nous la recevons.
Mais en même temps, nous devons aussi admettre que, tout aussi important, est le temps qui est donné pour les silences de Dieu. Ces silences sont présents dans la Bible, dans la vie du peuple d’Israël, dans notre vie. Parole et silence, non pas du tout comme ombre et lumière, mais comme un pointillé-un espace, un pointillé-un espace, tracent la ligne de notre relation à Dieu. En hébreu, la parole, davar, signifie aussi action.
Je pense à Siméon, ce vieillard sur le parvis du Temple, qui voit ce petit enfant de huit jours qui ne sait pas encore parler (savez-vous que « enfant » vient du latin infans qui veut dire «sans parole » ?) Et Siméon reconnaît dans ce « sans parole » la Parole de Dieu. Que connaissons-nous en fait de la vie de cet enfant, du « sans parole » qui est la Parole de Dieu ? En tout, guère plus de vingt et une journées. C’est peu sur trente-trois ans ! Et encore, de ces vingt et une journées, nous ne connaissons pas tout, sauf peut-être, et encore, pour les huit dernières.
Mais combien de silences pour combien de paroles ? Jésus «parlait», certes, mais c’est parfois par ses silences qu’il obligeait les gens à avancer. Le silence se définit généralement comme le fait de ne rien dire, de ne rien exprimer, ou de ne rien écrire. D’où l’amalgame trop rapide : silence égale absence. Sartre le disait : Dieu se tait, donc il n’existe pas. Lorsque nous témoignons, nous sommes souvent confrontés en premier lieu à cette question : « Pourquoi Dieu reste-t-il dans le silence ? »
Ce serait tellement plus simple si Dieu faisait de temps en temps une conférence de presse ! Il dirait : « Eh bien, voilà comme je vois les problèmes au Kosovo, ou en Irlande, voilà comment je vois les problèmes économiques dans telle région, je vais vous expliquer… » (Remarquez, Dieu ne le fait pas, mais on trouve toujours quelqu’un pour le faire à sa place !) Pourquoi tant d’injustice ? Pourquoi Dieu garde-t-il le silence ? Face à ces questions, nous essayons d’éviter notre conflit intérieur en trouvant des raisonnements de notre cru.
Mais quand on interroge la Bible de plus près sur le silence, il apparaît clairement trois grandes familles de termes autour de ce mot. Trois familles de mots en hébreu, qui évoquent trois silences, et que nous devons bien situer dans notre combat intérieur face aux silences de Dieu.