LA SOUFFRANCE A-T-ELLE UN SENS ?

© Jacques Poujol. Pages extraites de son livre « L’accompagnement psychologique et spirituel, guide de relation », Empreinte Temps Présent, 2007. Disponible sur le site de la librairie 7ici ou par mail.

 

En proie aux douleurs aiguës d’un cancer en phase terminale, le Cardinal Veuillot disait : « Nous savons faire de belles phrases sur la souffrance. Moi-même j’en ai parlé avec chaleur. Dites aux prêtres de n’en rien dire ; nous ignorons ce qu’elle est, et j’en ai pleuré. »

On est sans cesse confronté à la souffrance physique ou psychique. C’est pourquoi, dans la mesure où nous restons humbles devant ce mystère, il est bon de réfléchir à ces quelques aspects :

Les expériences de la souffrance

Nous disons « les expériences », car elle n’existe pas comme une réalité abstraite. Il y a des souffrances. Chaque personne a une façon unique de ressentir et d’assumer la souffrance.

Les douleurs physiques, légères ou intenses, passagères ou chroniques, sont le lot de presque tous les humains. Notre corps est touché par les maladies, les accidents, la vieillesse. Nous nous y résignons plus ou moins facilement, mais la souffrance d’un enfant, d’un jeune, la douleur insupportable ou incurable, nous révoltent.

Les troubles psychiques, mentaux, sont terribles pour ceux qui en sont atteints comme pour leurs proches. Etre dans l’abîme de la dépression est une souffrance insupportable mais ces maladies sont de plus considérées comme honteuses et donc vécues dans le silence et la solitude. On n’a pas honte de parler de ses migraines mais on n’ose pas dire que l’on souffre d’angoisse, d’obsession ou de timidité. A ces symptômes s’ajoute donc l’isolement par peur d’être incompris, jugé et rejeté.

Les peines morales accompagnent le deuil, la séparation, l’exclusion, le chômage, la solitude, l’injustice, la méchanceté des autres, la stérilité, etc. Il y a aussi des tourments spirituels liés à la lutte contre la tentation, aux péchés auxquels on succombe, aux doutes qui nous assaillent, ou bien au seul fait d’agir en chrétiens dans un monde qui ne connaît pas Dieu. Enfin, la compassion pour un être cher qui souffre, un enfant handicapé, un conjoint alcoolique, peut engendrer en nous une souffrance, due surtout à notre impuissance à lui venir en aide.

En réalité il est impossible de dissocier toutes ces souffrances : elles interfèrent les unes avec les autres et affectent notre être entier. Quelqu’un qui souffre, a mal dans tout son être.