5. Quelles perspectives d’épanouissement ?

(d’après Jeanne Farmer)

Il y a toujours un élément d’idolâtrie dans nos relations. Nous demandons aux autres de satisfaire nos besoins ou nous-mêmes essayons de satisfaire ces mêmes besoins chez les autres. Nous cherchons auprès de nos proches ce que Dieu seul est en mesure de nous donner : une acceptation totale, un sens à notre vie, la sécurité, une direction, la validation de nos opinions. Quand nous nous sentons responsables du bien-être de ceux que nous aimons, nous prenons la place de Dieu dans leur vie. Nous jouons au sauveteur, et ils n’apprennent pas à être responsables de leur propre vie. Cette idolâtrie est aussi appelée dépendance émotionnelle, et nous en avons tous hérité, à des degrés divers, par Adam et Eve.

Les familles qui ont le plus de difficultés sont précisément celles qui manifestent le plus cette confusion et cette dépendance relationnelles. Elles confondent la fusion avec l’amour. Elles font peser un grand poids sur tous leurs membres.

Vers la maturité émotionnelle et spirituelle

La source des difficultés de relations entre deux personnes proches (mari et femme, parent et enfant, frère et sœur ou amis proches) vient de cette absence de différenciation dont nous avons parlé. Si nous étions parfaitement différenciés, nos différences subsisteraient, mais nous serions parfaitement objectifs et capables de négocier avec nos différences, sans que cela devienne émotionnel. Mais avec nos proches, nous perdons notre objectivité, et nous réagissons émotionnellement. Nos réactions sont directement proportionnelles à notre dépendance à l’égard de l’autre. A la base, c’est une peur de la séparation (ou du rejet) qui nous tient en esclavage.

La question importante pour notre propre maturité, c’est de savoir comment être à la fois proche et accepter les différences ou encore savoir dire la vérité tout en exprimant l’amour. Il ne s’agit pas d’accepter les différences en étant distant, ni d’être proche en faisant comme s’il n’y avait pas de différences. La maturité émotionnelle fait partie de la maturité spirituelle. Un pasteur écrivait récemment : « Il n’est pas possible d’être un chrétien spirituellement mature, tout en restant émotionnellement immature » (Peter Scazzero). La maturité s’acquiert par la différenciation de soi. Il s’agit là d’une sagesse divine qui nous permettra d’être plus utiles et plus efficaces dans nos efforts pour aimer, et vivre des relations familiales saines et équilibrées.

Post-scriptum

Le thérapeute chrétien peut rencontrer des obstacles inattendus sur sa route, que je ne peux développer ici. Cependant, il convient de les nommer, car ils sont facteurs de dysfonctionnement dans les relations, et s’appuient sur des interprétations faussement bibliques :

  • L’amour des autres plus que soi, qui peut devenir une dépendance émotionnelle, et conduire au mépris de soi, parfois au burn-out.
  • Le déni des conflits, par idéal d’harmonie et d’unité, et négation de la différence.
  • Le renoncement à soi pour suivre le Christ, lorsqu’il correspond à une négation du sujet, et à une mort psychologique et spirituelle.

Bibliographie

« Je comme unique », par Jeanne Farmer, éd. Empreinte 2003

« Oser s’affirmer », par Cloud & Townsend, éd. Empreinte 2001

« Ces fausses croyances qui nous piègent », par Cloud & Townsend, éd. Empreinte 2004

« Familles en thérapie », par Salvador Minuchin, éd Erès 1998

« Génogrammes et entretien familial », par McGoldrick et Gerson, éd. ESF 1990