LE CHANTAGE ÉMOTIONNEL

© Jacques et Claire Poujol, Conseillers Conjugaux et Familiaux. Pages extraites de leur livre « Vivre à deux – bien communiquer, gérer les conflits », Empreinte Temps Présent, 2012. Disponible sur le site de la librairie 7ici ou par mail.

 

Il consiste à exploiter la sensibilité ou les faiblesses de l’autre pour parvenir à ses fins personnelles. On lui inspire un sentiment de culpabilité, on le menace d’une manière qui le blesse : « Si tu m’aimais vraiment, tu ferais…»

Ce chantage, qu’il soit conscient ou inconscient, est souvent le symptôme de difficultés plus profondes. Sous ses formes bénignes il se traduit par la bouderie, les larmes, la mauvaise humeur, un peu comme un enfant trépigne pour obtenir ce qu’il exige. Lorsqu’un partenaire cède à l’exigence de l’autre parce que ce dernier l’a rendu coupable, l’harmonie du couple est en danger. En effet l’autre va prendre l’habitude d’utiliser cette pression émotionnelle et il n’y aura plus de communication franche et honnête.

Ceux qui pratiquent le plus souvent le chantage sont les personnes trop dépendantes, ou immatures.

  • Un conjoint trop dépendant de l’autre a peur : pour se sentir sécurisé, il va se montrer plus possessif et culpabiliser l’autre sans arrêt.

Par exemple, une femme jouera à la petite fille incapable de vivre sans l’aide de son mari. Au début, cela flatte l’orgueil de celui-ci, mais ensuite cela l’irrite.

L’homme distrait, dans la lune, jouera de ce trait de caractère qui, au début, semble « charmant », pour laisser finalement sa compagne assumer toutes les responsabilités du foyer.

Le fait qu’une femme soit toujours aux petits soins pour son mari peut être une manipulation : il se sentira redevable envers elle et n’osera jamais exprimer aucune opposition. Il culpabilisera : « Je devrais avoir honte de lui parler comme cela, elle qui est si attentionnée pour moi… »

Dans un couple en crise, la femme peut ressentir le désir de partir trois jours pour réfléchir seule et au calme. (Les conseillers conjugaux appellent cela une séparation-réflexion, souvent très bénéfique.) Son mari, au lieu de comprendre son besoin de solitude, réagira par des menaces culpabilisantes du genre : « Je ne peux pas vivre sans toi… Si tu me quittes, même trois jours, je me suicide. »

  • Quant aux partenaires immatures, ils utilisent eux aussi souvent l’arme du chantage émotionnel.

Quelqu’un qui a eu une enfance gâtée, dont les parents cédaient à tous les caprices, est tenté de refuser d’évoluer sur le plan affectif, par crainte de devoir donner et non plus seulement prendre. Au lieu de s’accommoder des imperfections de l’autre, de faire des concessions, il va user du chantage émotionnel pour le pousser à adopter sa conception de la perfection.

Par exemple, un homme trouve que sa compagne se montre trop timide et réservée en société. Lorsqu’il est seul avec elle, il est très gentil à son égard ; mais parce qu’il a honte d’elle, il fera pression sur elle : « Fais des efforts, extériorise-toi », ce qui la culpabilisera et aggravera plutôt la situation.

Ou bien une femme reprochera à son mari ses difficultés financières ou professionnelles. Cette manœuvre de culpabilisation vise en fait uniquement à changer un aspect de son caractère.

Le chantage émotionnel est courant dans le domaine sexuel : « Si tu m’aimais vraiment comme tu le dis, tu accepterais de faire l’amour, même ce soir où tu es fatiguée. » Ou bien on force l’autre à une pratique sexuelle dont ce dernier n’a pas envie : « Ce sera une preuve que tu m’aimes… »