1. LES ASPECTS NEGATIFS DES CONFLITS DE COUPLE MAL GÉRÉS

Ces aspects négatifs sont évidents et bien connus.

A. Pour les partenaires eux-mêmes

Tout affrontement fatigue, car il faut beaucoup d’efforts pour dominer l’autre et sortir vainqueur. L’énergie dépensée est telle que l’on n’a plus de force pour quoi que ce soit d’autre. Des expressions familières traduisent ces malaises relationnels : « Je ne le digère pas… », « je vais éclater », « je suis fou de rage », « il me ronge », etc. La culpabilité apparaît. Ces tensions, si elles sont refoulées, peuvent même se transformer en haine de soi, dépression ou désir de suicide.

Dans un conflit, les partenaires s’engagent en profondeur, jusque dans l’intimité de l’être. Selon son issue, l’orientation de toute leur vie risque d’en être modifiée. Ils sont frappés dans leur substance, leur identité, les fondements de leur équilibre vital sont modifiés. Les problèmes de couple, lorsqu’ils sont graves, ont un aspect tragique, celui d’une épreuve existentielle au même titre que la maladie ou le deuil.

B. Pour la relation entre l’homme et la femme

Une querelle conjugale isole. Chacun devient indifférent à l’autre, se ferme sur soi, sur son ressentiment ; on a peur, on est méfiant. La communication est analysée négativement et déformée. Les partenaires deviennent sensibles à des détails, ils prêtent à l’autre des projets obscurs et mauvais. Les scènes de ménage laissent des traces qui alourdissent le climat relationnel, et diminuent la motivation à renouer les liens.

Le conflit finit parfois par diviser. Etant par principe le refus de tout accommodement, il exclut une solution conciliatrice et ouvre la porte à la rupture. La recherche d’un arrangement et la volonté de s’affronter sont évidemment contradictoires. Le conflit introduit une cassure dans l’ordre et l’harmonie existants et dans une relation qui était peut-être riche de potentialités.

C. La violence guette derrière toute dispute conjugale

Elle en est le risque majeur. Dans certains cas elle n’est pas manifestée, mais on sait que le recours à des paroles ou à des actes violents est toujours possible et que l’on peut au moins en menacer l’autre. De virtuelle elle peut devenir effective si l’on s’engage selon le rapport de forces dominant-dominé ; c’est alors qu’on entre dans une escalade menant à la force brutale. On est pourtant conscient que l’on réagit de manière démesurée et sans rapport avec ce qui a motivé le désaccord. Mais il est difficile de s’arrêter, une ébauche de violence appelant un surcroît de brutalité. Certaines femmes « avouent » être maltraitées par leur compagnon.

On distingue la violence directe, qui se manifeste de façon ouverte au cours d’une altercation, que ce soit par les paroles exprimées, par le timbre de la voix ou par la gestuelle (expression de la figure, mouvements et attitudes, gestes menaçants voire coups…) et la violence indirecte, qui ne s’extériorise pas ouvertement, mais est latente et insidieuse. Elle se manifeste par l’oppression, l’intimidation, la persuasion, la contrainte, le chantage, l’influence et la manipulation.

Il y a toutes sortes de transitions entre les deux attitudes suivantes : soit la violence est la dernière ressource à laquelle on fait appel, parfois à contrecœur, soit on l’utilise tout de suite pour mettre fin à une tension le plus rapidement possible, sans prendre le temps de négocier.

Le premier pas vers la violence est assez souvent le refus du dialogue. Il y a un rapport direct entre l’incapacité de s’exprimer oralement et les comportements violents. Ceux-ci apparaissent lorsque les partenaires sont dans l’impossibilité de traduire verbalement leurs frustrations et leurs désirs, par exemple lors d’une forte décharge émotionnelle.

Selon l’Association pour la prévention de la violence en privé, l’homme violent se trouve dans tous les milieux sociaux. Souvent, il a lui-même été battu, ou a vu ses parents se battre. On ne lui a pas appris la notion de limite (par exemple, il cassait ses jouets exprès, sans qu’on lui dise rien). Il a fréquemment une très mauvaise image de soi, ou un narcissisme exacerbé pour tenter de conjurer cette mauvaise image.

Sa brutalité se concentre sur son épouse, parce qu’il la perçoit comme une possession sur laquelle il a des droits, parce qu’il attend d’elle qu’elle comble ses propres manques, ou parce qu’il la méprise d’être son double qu’il déteste.

L’homme violent qui veut se soigner devra apprendre que ce qui le guide lorsqu’il frappe, c’est la peur, peur de lui-même et des autres. La haine qu’il a pour autrui est avant tout une haine de lui-même. Il devra réaliser que c’est lui qu’il hait à travers sa femme. Enfin, il devra parvenir à se représenter la douleur de celle-ci, ce qu’il oublie tout à fait lorsqu’il frappe.