LES ATTITUDES QUI DETRUISENT L’HARMONIE CONJUGALE

© Jacques et Claire Poujol, Conseillers Conjugaux et Familiaux. Pages extraites de leur livre «Vivre à deux – bien communiquer, gérer les conflits», Empreinte Temps Présent, 2012. Disponible sur le site de la librairie 7ici ou par mail.

 

Lacan disait que les humains sont des êtres doués de parole, des « parlêtres ».

Une bonne communication ne saurait, à elle seule, éviter l’apparition de grosses tempêtes dans un couple, mais elle peut empêcher que des nuages éclatent en orages dévastateurs. Elle permet aussi aux frustrations profondes de se dire et d’être entendues.

Elle n’est pas un but en soi, mais elle a pour objectif la communion. Elle est davantage du domaine du savoir-être que du savoir-faire, même si bien sûr elle se traduit par des attitudes concrètes.

Malheureusement dans de nombreux ménages la communication est déficiente.

Il existe des comportements qui, s’ils se répètent quotidiennement, empoisonnent la vie commune. Thomas Gordon (La méthode Gordon expérimentée et vécue, Belfond) en a repéré une douzaine, nous en rajoutons quelques autres.

1. Culpabiliser

Le but est de rendre l’autre responsable de notre malaise, de notre souffrance ou d’une situation. On joue la « coulpe dans le couple ». Le partenaire va alors avoir tendance à se sentir fautif  :

« Tu as voulu que j’arrête de travailler pour élever notre fille, et maintenant tu me reproches d’être à ta charge… »

« Si tu ne m’avais pas incité à gagner davantage d’argent, je n’aurais pas fait d’infarctus. »

2. Ordonner, diriger, commander

« Cesse de ressasser cette histoire ! »

« Tu devrais téléphoner à ta mère un peu plus souvent. »

Ces phrases dictent à l’autre la conduite qu’il doit adopter. Il aura envie de se rebeller, de se défendre. Il pensera que vous n’avez aucune confiance en ses capacités.

3. Nier l’autre dans ce qu’il dit ressentir

« J’ai une migraine affreuse !

– C’est étrange, car tu as l’air en pleine forme ! »

Parfois une requête de l’un est remplacée par une requête identique de l’autre :

« Franck, la tête me tourne, comme si j’allais m’évanouir d’un moment à l’autre…

–   C’est tout à fait comme moi, Sylvie… Je me demande si un petit remontant ne me ferait pas du bien ! »

4. Menacer, avertir, effrayer

« Tu ferais mieux de me faire tout de suite des excuses, sinon tu le regretteras plus tard. »

Ces menaces, explicites ou implicites, directes ou indirectes, contribuent à maintenir le conjoint dans la dépendance et limitent sa liberté de choix. Elles l’incitent à ne pas se plier à vos injonctions, simplement pour vérifier si les conséquences négatives que vous avez annoncées se réalisent.

5. Dévaloriser, ridiculiser, faire honte

« Toi et ta manie du rangement, pas étonnant que ton fils se rebelle ! »

« Tu es tellement à cheval sur l’exactitude ! J’ai l’impression d’être marié à l’horloge parlante. »

«  Tu n’es qu’un enfant gâté, tu devrais avoir honte ! »

De telles paroles blessent profondément l’amour-propre du partenaire, qui se sent alors humilié. Il réagira par la riposte  : «  Tu n’es pas la perfection non plus ! » ou cherchera des excuses  : «  Je ne suis pas si maniaque. Il faut bien que la maison soit en ordre. »

6. Utiliser le chantage

On cherche à influencer l’autre et ses choix par une menace fantasmée ou imaginaire  :

« Je te suivrai à l’étranger où tu viens d’avoir ce nouveau poste, mais je suis sûre que j’aurai tellement le mal du pays que je ferai une dépression. »

7. Moraliser, sermonner, faire la leçon

« Ce n’est vraiment pas bien d’être fâché avec ton collègue. Crois-tu que ce soit une attitude bien chrétienne ? »

Ces leçons de morale indiquent à l’autre votre manque de confiance en sa capacité de juger et d’agir et suggèrent qu’il ferait mieux de se fier à votre opinion.

8. Expliquer, persuader par la logique, argumenter

« Je vais t’expliquer en quoi consiste ton erreur. »

« Je suis certaine d’avoir raison, d’ailleurs je l’ai lu dans un livre de Françoise Dolto. »

Jouer au « professeur » risque d’inciter « l’élève » à se mettre sur la défensive, à s’irriter  : « Tu crois que je ne le sais pas ? »

9. Etiqueter, enfermer dans une image

« Ça ne sert à rien de te parler, je sais par avance que tu ne me comprendras pas. »

10. Juger, critiquer, blâmer

« Tu es la personne la plus susceptible que j’aie jamais vue.»

« Tu ne réfléchis jamais aux conséquences de tes actes. »

Ces paroles amènent l’autre à se sentir inférieur  ; il va soit se refermer comme une huître  : « Je ne lui dirai plus rien », soit riposter  : « Et toi, tu t’es vue ? »

11. Deviner les pensées de l’autre

« Je suis sûre que tu aimes une autre femme, c’est pour cela que tu rentres toujours en retard du travail. »

« Tu vas encore te mettre en colère quand tu apprendras que j’ai rayé la carrosserie de la voiture. »

12. Interpréter, analyser, diagnostiquer

« Ton problème, je le vois bien, c’est que tu manques de confiance en toi. »

Cette interprétation des motifs, des paroles ou des actes de votre partenaire, l’informe que vous avez établi votre diagnostic et que vous l’avez percé à jour. Vous vous placez au-dessus de lui. Il va se bloquer, et ne partagera plus rien avec vous.

13. Enquêter, questionner

« Pourquoi t’es-tu mis en colère lorsque le policier t’a verbalisé ? »

« D’où vient que tu aies peur de prendre l’avion ? »

Ces questions risquent de blesser l’autre dans son intimité, d’être ressenties comme une menace et elles limitent sa liberté en lui dictant ce qu’il doit dire.

14. Esquiver, distraire, traiter à la légère

« Allons nous mettre à table et oublions tous tes soucis… »

« Parlons de choses plus plaisantes ! »

Ces paroles dénotent un manque d’intérêt, une indifférence aux soucis du conjoint, qui va se sentir rejeté et frustré. S’il a éprouvé le besoin de vous parler, c’est pour être pris au sérieux et écouté.

15. Rassurer, minimiser, consoler

« Demain tu prendras les choses plus sereinement. »

« Tu t’en remettras, le temps arrange tout. »

« Ce n’est pas si grave, allons ! »

Il est tentant de remonter le moral de l’autre en lui conseillant d’oublier ses angoisses, parce que la force des émotions qu’il exprime nous met mal à l’aise et que nous craignons d’en entendre davantage.