Synthèse de la 3ème Université d’été de la relation d’aide chrétienne

24 août 2010 à Lyon-Valpré, par FRANCOISE LANG

Inspectrice d’Académie, détachée à la coopération internationale en expertise éducative au CIEP

(Centre international d’études pédagogiques) à Sèvres (Hauts de Seine)

 

Cette 3ème Université d’été nous a réunis pour explorer la question suivante : « L’individu et le groupe : contrainte ou épanouissement ? »

Autrement dit le groupe permet-il à la personne d’accéder à l’autonomie ? De trouver sa juste place dans le groupe ?

Ou bien le groupe (le couple, l’église, la famille, les collègues, les amis, la société…) bride-t-il la personne dans la construction de son je, et partant, de la construction de son identité, de sa différenciation ?

Différents éclairages et résultats de recherche nous ont proposé des pistes de réflexion et réponses à cette problématique.

« Oser être Soi et être Avec, pour Soi et pour les Autres dans une société liquide et d’épreuves pour la personne » aborde une première réponse.

Etre Soi signifie autant la conformité avec soi-même que le fait d’être construit grâce à tous les éléments captés autour de Soi, avec les Autres, auprès de son entourage.

L’être Avec décrit les interactions du Soi avec les Autres.

On doit retenir que c’est la Relation qui définit la personne, l’être humain.

Le Soi sans l’Avec serait source de dysfonctionnements « egosociopathologiques » ;

La société de liquéfaction dans laquelle la personne évolue aujourd’hui le vivre Avec est mis à mal par la dé-traditionalisation, par la dé-institutionalisation, la dé-politisation, la mobilité réelle, virtuelle, imaginaire, le changement voire la disparition de repères sociaux.

Alors que fait l’être Soi ?

Il se choisit lui-même comme repère (réflexivité).

Dès lors les modalités de l’être Avec se vivent comme des épreuves.

Comment donc tenir l’équilibre entre l’être Soi et l’être Avec ?

  • En trouvant l’équilibre dans cette tension créatrice. Il s’agit d’apposer et non d’opposer puisque contrainte et épanouissement sont partie intégrante de la même entité.

Comment tenir l’équilibre entre l’être pour Soi et l’être pour les Autres ?

  • En s’engageant dans la participation, la solidarité, la coopération….

Comment construire le Soi dans le deuil de l’Autre ? Quand l’être cher a ou est disparu ?

Lorsque toutes les étapes du deuil et l’expression des émotions inhérentes sont dépassées, la personne continue la construction de l’être Soi et de l’être Avec dès lors qu’elle découvre le sens de la perte : elle s’interroge : « Qu’est-ce que je comprends, j’apprends à travers la perte de l’autre ? »

Non seulement j’apprends de ce que j’ai perdu mais je prends dans ce que j’ai perdu, tel un héritage (ses qualités par exemple).

A retenir aussi que l’environnement est la condition du développement de la personne. J’existe avec l’autre, pas sans l’autre.

L’individu et le groupe co-agissent et ré-agissent dans une dynamique interactive qui permet à la personne de découvrir sa façon d’être en relation et sa façon d’être au monde.

C’est cette interdépendance réciproque qui définit, dans la relation personne/groupe et Soi/Autre.

Il n’y a plus contrainte ou épanouissement, mais contrainte et épanouissement. Car tout changement passe par le groupe : le Soi y exerce sa responsabilité, sa liberté et y crée son devenir.

Et la fête dans la sexualité dans notre problématique ?

Nous avons à construire notre désir, spirituellement et corporellement, afin d’améliorer notre corps de relation, fait pour aimer. Le corps se fait lien dans la relation je et tu.

Dans l’acte sexuel, Soi et l’Autre ne font qu’un. Paradoxalement il faut alors l’oubli du Soi pour devenir Je.

Le bon usage du temps, de l’extraordinaire dans l’ordinaire, le bon usage de l’espace, permettent « l’être ensemble » dans la fête sexuelle.

Là encore à la question initiale ou… ou ?, la réponse est et… et ! La contrainte est au service de l’épanouissement.

Après les réponses sociologique, sociale, sexuelle, il y a la réponse théologique.

En effet, aujourd’hui se fait à nouveau sentir le besoin d’accompagnement (non plus de paternité ou de direction) spirituel afin de « s’engager en profondeur et en vérité ».

L’accompagnement spirituel introduit la dimension relationnelle dans le cheminement de l’individu. Cette relation le sert, elle est un épanouissement puisqu’elle évite les écueils de la contrainte avec prudence et pertinence : elle ne guide pas, ne conseille pas, écoute, respecte, propose, connaît les phases et les crises de la vie de foi.

Même dans les situations les plus tragiques, lorsque la contrainte est à son degré maximum, la personne s’en sort grâce au groupe, grâce à l’Autre. Comment ? En parlant, en trouvant un sens à l’épreuve. L’homme, cet être de parole, de relation, sources d’épanouissement pour lui.

La parole apporte une réponse technologique à notre problématique puisqu’elle permet aussi la distance avec le virtuel, qui nous présente une image de la réalité, une image distordue, tronquée par notre perception.

La parole, qui interroge, reformule, vérifie… afin de fuir l’interprétation et sortir de la contrainte !

Enfin Approche systémique et Coaching rétablissent la santé du Soi, la santé de la relation du Soi au groupe, libèrent sa capacité à choisir, agir, exister en Soi, pour Soi, Avec Soi, pour les Autres.

Réponses diverses et représentatives de champs de recherche variés nous ont proposé des pistes de réflexion. C’est-à-dire :

  • La bonne question n’est pas « ou… ou » mais « et… et » : le groupe est contrainte et épanouissement pour le Soi. C’est la tension créatrice entre les deux pôles qui est bénéfique et permet de placer le curseur au bon endroit pour son Soi.
  • Le Soi ne peut exister sans l’Autre, le groupe, l’environnement, l’accompagnement, la parole.
  • Deux dimensions matérialisent la relation
    • la parole (dans les domaines du virtuel, du pardon, de la thérapie, de l’accompagnement, de la relation d’aide, du coaching, de l’approche systémique…)
    • le corps, interface entre Soi et Soi, Soi et l’Autre

Alors efforçons-nous de sauvegarder notre corps de relation, fait pour aimer, par le soin à y apporter (santé comme source de partage), par la gestion du temps, de la fête, de l’extraordinaire dans l’ordinaire…

Développons nos cinq sens pour trouver le sens ! (Gestalt thérapie, coaching, relation d’aide…) et accueillons nos émotions, langage du corps, et celles de l’Autre.

En un mot, sans vouloir plagier un verset que tous connaissent, le SOI ne peut rien faire sans l’Autre !