ÉTUDE DU MOT « PORNEIA »

Valérie Duval-Poujol, Théologienne

Voir Robert Sommerville, La première épître de Paul aux Corinthiens, Edifac, Tome 1, p.155, Un excursus sur « porneia »

 

Ce mot est difficile à traduire : immoralité, impudicité (trop restreint), débauche, inconduite (trop large), fornication (démodé). La traduction la ‘moins pire’ : « Immoralité sexuelle »

Etymologiquement, ce mot vient de porné, la prostituée. Il désignait donc la prostitution, l’usage de prostituée. Mais très vite son sens s’est élargi pour désigner toutes les formes d’inconduite sexuelle. Ce terme peut décrire :

  • Des rapports sexuels illicites (en référence aux interdits qu’on trouve dans les ois bibliques comme l’inceste)
  • La prostitution
  • La lascivité
  • L’adultère (Nombres 5, 20)
  • Les activités homosexuelles

En fait, ce terme décrit toutes relations sexuelles extra-maritales dans la mesure où elles dévient des normes sociales et religieuses acceptées (homosexualité, prostitution, pédophilie, promiscuité).

Quel sens emploie Jésus ? Ce n’est pas l’important dans le passage de Matthieu où l’accent est ailleurs :

  • Il montre qu’il n’y a pas de caractère indissoluble du mariage. Paul fera de même en 1 Corinthiens 7.
  • Il tranche dans le débat de son époque sur la compréhension de la répudiation : il existe une loi dans l’Ancien Testament évoquant le remariage (Deutéronome 24) qui évoque le cas où un mari répudie sa femme. Notons que ce n’est pas une loi sur le divorce, ni un traité envisageant tous les cas ! Dans le monde juif, il y avait deux écoles face à l’interprétation de cette loi : une minimaliste (répudiation possible seulement si la femme trompe son mari) et une maximaliste : possibilité de répudier sa femme même pour un plat trop cuit. On veut savoir où Jésus, le «libéral » se situe ! Or il va placer la barre plus haut encore que son époque : il parle de « ne pas séparer ce que Dieu a uni » : on est adultère même quand on regarde seulement une femme ! Le désir de Jésus est de replacer le mariage dans son contexte créationnel, dans le projet de Dieu pour l’humain. D’où la réaction violente des disciples : si c’est pour la vie et dans ces conditions, il vaut mieux pas se marier !
  • Il oriente ainsi la conversation vers une théologie de l’échec et de la grâce.