Citations en langue française

Le Self

Le self, c’est à la fois le Moi, le ça et une partie du Surmoi. C’est la partie la plus créatrice de notre personnalité, c’est celle qui imagine, qui joue. C’est le fondement du symbole, qui nous donne le sentiment d’exister. C’est la partie que nous reconnaissons comme étant nous-même, nous représentant spécifiquement.

Le vrai self est un état où on a suffisamment confiance en soi et en l’environnement pour être soi-même. Le self nous donne l’impression de notre identité, de notre intimité.

(Internet, le 13 décembre 2006)

1. La différenciation du self

L’abuseur impose sa volonté à la victime et sa vision de la réalité, qui peut être une version tordue des faits. Même adulte, la personne abusée croira que son abuseur la contrôle. (…) C’est comme si la personne continue à habiter la version de la réalité présentée par l’abuseur, qu’elle restera sous son contrôle.

Le fait qu’un abuseur ne sera jamais confronté à la justice accentue la toute puissance de l’abuseur dans la tête de sa victime : il est considéré comme au-dessus de la loi. Si, dans le développement normal de l’enfant, le père est considéré comme le représentant de la loi et de la réalité, comme le gardien de la séparation et des limites, (Mollon, 1993), le père abusif devient alors celui qui emprisonne l’enfant dans un monde pervers duquel la loi est exclue.

2. Le self subjectif (le sentiment/sens d’être la cause et l’auteur de ma pensée et de mon agir)

La personne abusée se sentant impuissante et passive, son potentiel d’être acteur de ses propres pensées et de ses mouvements est sérieusement atteint.

Une des conséquences est que le sens de la réalité est perturbé. Avoir une vision personnelle de la réalité est un facteur principal de la construction du moi. (…)

Il arrive fréquemment que cette distorsion subjective du self conduit la personne abusée à imposer son pouvoir sur d’autres, s’identifiant à son agresseur.

3. Le self objectif

Cela concerne l’estime de soi et l’image de soi de la victime. Elles sont négatives à l’extrême, quelque chose qui touche au non-humain et aux excréments. Si la personne a des hallucinations auditives, elles lui crieront qu’elle/il est une ordure qui mérite la mort.

Bien que l’enfant soit une victime à part entière, impuissante et contrôlée par la puissance, la force et les capacités d’intimidation, de menaces et de trahison de l’abuseur, il/elle se reprochera d’avoir été abusée.

Ce qui motive l’abuseur n’est pas le désir sexuel en soi, mais le désir sadique de contrôler, violer, intimider, de prendre possession du self de l’autre : c’est l’intention malveillante envers l’autre qui alimente son désir sexuel. La conséquence, pour la victime, est proche d’un anéantissement du self et la création d’image négatives de son self à un extrême quasi intolérable et générant, de panique, des mécanismes défensifs de dissociation et de projection.

Son raisonnement semi-conscient est que, si sa mère n’a pas su la protéger de son abuseur, c’est qu’elle n’en était pas digne. Elle placera toujours les besoins des autres avant les siens propres.

La pathologie de la personnalité multiple est de jongler avec une réalité qui est intolérable. Le problème est que les images du self qui doit supporter l’empreinte de la réalité et des fantaisies de l’abuseur, ne disparaîtront pas à tout jamais, mais menacent de revenir à la conscience.

4. Structure et organisation du self

La personne qui a été extrêmement traumatisée ou abusée dans son enfance peut développer un self morcelé. Un tel fonctionnement est le résultat d’un self brisé en mille morceaux, de dissociation et de gestion d’expériences traumatiques.

L’état du self de la personne qui a expérimenté des traumas sévères durant l’enfance est souvent chaotique, parce que l’usage frénétique de défenses dissociatives et maniaques provoquent des ravages dans l’intégration et la stabilité du self. A un moment la personne est un petit enfant abusé et apeuré, à un autre moment un agresseur triomphant, puis un adulte qui nie l’abus, et ainsi de suite.

Non seulement l’enfant abusé ne fait pas l’expérience de l’empathie nécessaire pour construire un self cohérent et cohésif, mais il /elle expérimente une infraction qui éclate la structure potentielle de son self.

5. L’équilibre entre le self subjectif et le self objectif

Cela concerne l’équilibre et le mouvement délicats entre la conscience du self interne (émotions, désirs) et celle vue de l’extérieur, qui est sollicité pour nourrir les relations interpersonnelles et sociales.

La personne abusée se bat contre un contexte de terreur chronique, scrutant l’environnement pour en épier le danger.

L’arrière-plan de terreur se révèle extrêmement effrayant au monde intérieur des sentiments et des fantasmes. Une telle personne essaie de garder le contrôle et la maîtrise sur le monde interne, comme sur le monde externe. Sa conscience est suspendue entre deux mondes de terreur. La communication entre ces deux mondes est enrobée de peur de la folie, comme cette situation est hors contrôle.

La communication sociale optimale, spécialement dans les relations d’intimité, implique un échange raffiné et continu entre une empathie avec le self et une empathie avec l’autre. Il est insoutenable d’être empathique avec les intentions malveillantes de l’abuseur et de réaliser qu’on est soi-même l’objet de cette intention et d’être empathique avec le self qui en est l’objet.

L’abusé ne parvient ni à faire autrement, ni à atteindre le self, mais reste à tout jamais gelé entre les deux.

6. Les illusions d’autosuffisance

La personne qui a été extrêmement abusée dans l’enfance perçoit naturellement qu’elle ne peut faire confiance à personne. Une des conséquences de l’abus possible est de nourrir des comportements et des croyances rigides envers les autres personnes, blindées qu’elles sont contre toute opinion nouvelle.

Un des problèmes récurrents chez une personne abusée est que, si elle construit une relation d’intimité avec une personne, chaque comportement de celle-ci lui rappelant vaguement les agissements de l’abuseur, réveilleront en elle les souvenirs récurrents de l’abus. Elle réagira probablement en s’enfuyant, dans le désir de se protéger.

7. Sens de la filiation

La personne abusée par un membre de sa famille niera souvent sa filiation, qu’elle associe à un immense sentiment de honte. C’est la raison pour laquelle certaines personnes abusées coupent les ponts avec leur famille.

Si la famille a été équivoque dans sa manière de poser des limites, et confuse au niveau sexuel, si le couple sexué a été un parent et un enfant, la notion de hiérarchie de la famille sera perturbée. La question de savoir qui est qui et qui vient d’où, sera embrouillée et troublée.

(p. 41 à 48, traduction personnelle).