LES CONSEQUENCES DE L’EMPRISE PSYCHOLOGIQUE

 

© Jaques Poujol – Pages extraites de son livre « Abus spirituels – S’affranchir de l’emprise »,

Empreinte Temps Présent, 2015, avec autorisation.

Disponible sur le site de la librairie 7ici ou par mail.

 

  • La confusion s’installe dès la mise en place de la main mise, la personne n’osant pas ou ne sachant pas se plaindre. Elle est comme anesthésiée, se plaint d’avoir la tête vide et des difficultés à penser ; elle subit un véritable appauvrissement, un anéantissement partiel de ses facultés, une amputation de ce qu’elle avait de vivant et de spontané.
  • Le doute : lorsqu’elle apparaît ouvertement, la violence morale, masquée par l’emprise, vient faire effraction dans le psychisme qui n’y était pas préparé, puisqu’il était anesthésié par la soumission. Il s’agit d’un processus impensable : la victime et les éventuels témoins sont
    incapables de croire ce qui se déroule sous leurs yeux car, à moins d’être pervers soi-même, une telle méchanceté sans aucune compassion est inimaginable. On tend à prêter au pervers spirituel des sentiments (culpabilité, remords, tristesse) dont il est complètement dépourvu.
    Dans l’impossibilité de comprendre, la proie se retrouve sidérée, déniant la réalité de ce qu’elle n’est pas en mesure de concevoir. Face à ce rejet traumatisant, ressenti, mais nié verbalement, elle essaie en vain de trouver une explication rationnelle.
  • Le stress : accepter la servilité qui est exigée d’elle ne se fait qu’au prix d’une tension intérieure très importante, permettant de ne pas mécontenter le leader dominateur, de le calmer quand il est énervé, de s’efforcer de ne surtout pas réagir car elle s’en culpabiliserait. Cette
    tension est génératrice de stress. Les personnes hypersensibles éprouvent intensément les pressions internes, un pervers absolument pas. Il échappe au stress et à la souffrance interne en rendant la victime responsable de tous ces dérangements.
  • La peur : qu’il parvienne ou non à ses fins, le tourmenteur sollicite en son souffre-douleur une part de violence qu’il voudrait méconnaître en lui. À ce stade, la personne décrit un sentiment d’effroi. Elle est sur le qui-vive en permanence.
  • L’isolement : alors qu’elle affronte toutes ces déstabilisations, elle se sent très seule. Elle ne sait pas comment en parler dans l’église ou à l’extérieur, tellement la destruction souterraine est indicible. Il faut savoir que le manipulateur spirituel salit (salir) : il salit sa ou ses victimes, il s’allie (s’allier) par le silence qu’il leur impose parce qu’il en fait malgré elles ses alliées. De plus il s’allie avec d’autres personnes contre la victime, enfin un manipulateur, ça lie (lier) par les mensonges qu’il dit partout, par le trouble qu’il fait naître chez ses proies. Un responsable pervers est capable de convaincre tout un Conseil d’église d’exclure sans recours une personne qu’il a choisi de détruire.
  • Le choc se produit lorsque la victime prend conscience qu’elle a été abusée spirituellement. Jusqu’alors, elle n’était pas méfiante et même trop confiante. Brutalement, elle comprend qu’elle a été le jouet d’une manipulation. Elle se retrouve désemparée, blessée, tout s’écroule. L’importance du traumatisme vient de l’effet de surprise et de son impréparation, conséquence de l’emprise. Lors de ce choc émotionnel, douleur et angoisse se mêlent. C’est une sensation d’effraction violente, de sidération, de débordement, d’effondrement que certains décrivent comme une agression physique : « C’est comme un coup de poignard ! »
  • La décompensation : les capacités de résistance d’un être humain ne sont pas infinies, elles s’érodent progressivement et conduisent à un épuisement psychique. Au-delà d’une certaine quantité de stress, le travail d’adaptation ne se fait plus et il y a décompensation. Des troubles plus durables se mettent en place. La personne présente généralement un trouble anxieux généralisé (T.A.G.), des troubles psychosomatiques ou un état dépressif. Chez un sujet plus impulsif, la décompensation peut se traduire par un passage à l’acte violent (tentative de suicide) qui le conduit dans un service d’urgence. Chez d’autres, la réponse est physiologique : ulcère de l’estomac, tachycardie, maladie cardiovasculaire, évanouissements, maladie de peau, amaigrissement, affaiblissement, attaques de panique, etc.
  • La séparation : face aux agissements toujours plus menaçants du leader religieux, la personne, soit se soumet et accepte sa domination, soit se révolte et combat pour trouver l’énergie de partir. Le plus souvent, elle y réussit quand elle remarque des manipulations envers un autre chrétien ou quand elle a trouvé un allié à l’intérieur du groupe ou à l’extérieur.
  • L’évolution :même si la victime, au terme d’un effort de séparation, perd tout contact avec ce responsable toxique, elle gardera des séquelles dramatiques d’un passage de sa vie où elle aura été réduite à la position d’objet. À partir de là, tout nouvel événement prendra un autre sens rattaché à l’abus subi. Quelques victimes s’en sortent sans reliquat psychique autre qu’un mauvais souvenir bien maîtrisé. D’autres garderont des troubles psychiques ou somatiques à retardement.

 
La victime d’abus spirituel peut être confrontée à un de ces trois types d’abuseurs ou bien être prise dans un système qui est en soi abusif. De même, il est possible d’être un abuseur seul ou d’opérer au sein d’un système abusif.
Dans ce dernier cas, même quelqu’un qui n’est pas un abuseur mais qui se retrouve dans un tel groupe n’est pas à l’abri de fonctionner comme un abuseur.