SEUL(e) FACE À MOI-MÊME
Jacques Poujol, article paru dans la Newsletter d’Empreinte Formations de novembre 2016
Si nous sommes appelés à marcher, à être avec nos contemporains, il est des moments dans nos vie personnelle où nous sommes seuls face à nous-mêmes – et nous devons alors continuer notre voyage et avancer. Cela peut être le fait d’expériences propres ou des aléas de nos vies mais surement le plus souvent parce que c’est le propre de l’humain de connaître ces moments de face à face « avec soi-même ». Ainsi, si nous sommes appelés à vivre avec les autres, nous le sommes tout autant à nous retrouver avec nous-mêmes.
Jacques Ellul avait une formule célèbre qui me semble bien adapté à ces moments : « Penser global, agir local ». Ainsi le chemin solitaire n’est pas un retrait du monde mais ce temps de conscience devant Dieu, le Dieu de la création, le Dieu de l’histoire de l’humanité, celui qui marche aux pas des siècles, celui qui a cette « vision globale ». C’est ce temps qui doit précéder toutes nos actions, être attentifs dans cette solitude personnelle à celui qui est l’Auteur de toutes choses – de l’histoire globale et de nos engagements personnels – et qui les mènera alors à leur achèvement. L’Ecclésiaste nous le disait : il y a un temps pour toutes choses – un temps pour s’imprégner du « global » et un temps pour comprendre notre place et notre action locale.
Dans ce temps de cheminement plus personnel nous avons besoin, afin de ne pas trop se perdre en route ni de se décourager, d’avoir des balises nous aidant à construire cette réflexion personnelle. Quatre facteurs influencent nos vies, nos engagements.
- Tout d’abord la présence du Dieu qui est incarné dans l’histoire et qui reste attentif à celle-ci même s’il nous semble des fois peu compréhensible.
- Puis la réalité des oppositions, qu’elles soient spirituelles ou philosophiques.
- Il y a aussi les dysfonctionnements de la société en ce qu’elle est marquée et traversée par les ambitions humaines.
- Et enfin nous même, appelés à vivre ces tensions créatives, trouver les points d’équilibre – et alors comprendre quand nous devons résister à ceci ou cela ou agir pour le changement là où il est souhaitable.
Comment être dans ce monde sans être du monde, dit Jésus.
Garder cette confiance qui nous fait dire que même si nous ne voyons pas tous les résultats, « je sais que c’est le chemin à prendre pour moi ».
N’oublions jamais que l’ « Esprit du temps » et l’Esprit de Dieu sont aussi insaisissables que le vent, aussi purificateurs que le feu, aussi doux que la colombe mais aussi apaisants que l’huile. Nous pouvons tenir ce paradoxe dans nos existences sans nous perdre dans cette double erreur : d’associer le monde et la foi – de vouloir « sauver » ce monde – ou de les séparer à jamais – s’en retirer, être des personnes « hors sol ».
C’est dans cette tension intérieure face au maître de l’histoire et avec cette réflexion qui guide pour nous nos penser nos actions, qu’il y a le chemin au cœur de nos vies – au cœur du monde.