2. L’absence de principes déontologiques

A. Déontologie orientée vers la santé

Il convient de distinguer la P.N.L. de ses applications et ce plus particulièrement encore lorsque l’on porte des jugements de type éthique de manière générale. Il semble évident qu’on ne peut juger l’éthique d’un chirurgien par le fait qu’il utilise les mêmes outils qu’un boucher ou même qu’un assassin. C’est pourtant ce que font habituellement les détracteurs peu rigoureux de la P.N.L. lorsqu’ils accusent celle-ci de manière globale. Il tombe sous le sens que l’éthique d’un manager diffère de celle d’un thérapeute. Il ne viendrait à l’idée de personne de les amalgamer uniquement parce que tous deux parlent le Français ni de considérer la langue française comme non éthique parce que certains escrocs s’en servent pour gruger leurs proies. Il semblerait pourtant que ce soit la base du raisonnement des détracteurs de la P.N.L..

Dans la pratique de formation de la P.N.L., il faut donc distinguer les niveaux de formations générales, classiquement décrits sous les termes de praticien et de maître-praticien, d’une véritable formation de psychothérapeute. Il est important de répéter qu’une formation de maître-praticien n’est pas une formation de psychothérapeute, et que les brochures sur ces formations sont explicites à ce sujet. Ne s’inscrivant pas au départ dans ce cadre, ces formations ne présentent donc pas le même cadre éthique.

Un nombre croissant d’instituts de formation européens se sont toutefois souciés d´intégrer la P.N.L. dans une véritable formation à la psychothérapie qui encadre les outils spécifiques de la P.N.L. dans un cadre conceptuel et éthique structuré. Après de nombreuses années, cette approche thérapeutique de la P.N.L. a finalement été reconnue comme valide par l´Association Européenne de Psychothérapie (EAP). Elle a ainsi obtenu la validation de ses pairs et ce y compris de praticiens et d´experts d´autres approches thérapeutiques. Les études scientifiques de validation, les travaux de validation empirique, la déontologie mise en place par ce courant thérapeutique de la P.N.L., ont progressivement convaincu les experts des autres disciplines rassemblées au sein de l’EAP. Il convient donc maintenant à la communauté P.N.L. de diffuser plus clairement ce message auprès du public, afin de l’aider à différencier l’approche de la P.N.L. de ses applications dans des domaines spécialisés, et donc de dédramatiser les peurs que le manque de compréhension de cette approche pourrait parfois soulever.

B. Manipulation

Une autre critique fréquente est d’accuser la P.N.L. de “manipulation”, ce qui semble ici relever d´une double confusion, entre l´approche de la P.N.L. et certaines de ses applications spécifiques d´une part, et entre la puissance d´un outil et l´éthique de son utilisateur d´autre part. Dire que la P.N.L. est une manipulation dangereuse est comme de dire qu´il faut interdire la vente de marteaux sous prétexte que quelqu´un s´est servi d´un marteau pour assassiner son voisin. Comme on le sait, l´éthique n´est pas une qualité intrinsèque de l’outil mais de son utilisateur. Il parait donc absurde de vouloir incriminer la P.N.L. de manière globale et sans nuance, sous prétexte du possible manque de discernement d’un utilisateur ou d’un autre. Cela reviendrait à incriminer un traitement de texte sous prétexte qu’il permet d’écrire n’importe quoi dans un rapport.

Toutefois, tout comme une voiture est potentiellement plus dangereuse qu´un vélo de par sa puissance accrue, les puissants outils de modification de l’expérience subjective mis au point par l’approche P.N.L. – qui permettent de gagner du temps (et donc également d´économiser de l´argent et de la souffrance) dans la résolution de difficultés – nous obligent à prêter encore plus d´attention à l’éthique de leurs utilisations que si nous pratiquions d’autres approches. Il est indéniable que les outils de la P.N.L. peuvent servir à modifier la réalité subjective d’une personne, la façon avec laquelle elle perçoit ou interprète son existence. D’une certaine manière ils permettent de « manipuler » la perception de la réalité d’un patient et c’est bien pour cela qu’il vient nous consulter !

Lorsque quelqu’un est en dépression, voit toute sa vie en noir, ne comprend plus le sens de son existence (ou tout autre motif de consultation psychologique) et nous demande de l’aide, il nous demande de l’aider à changer, à modifier sa manière de concevoir son existence afin d’être plus à même de résoudre ses difficultés. Tout comme un bon ostéopathe se doit d’être un expert de la manipulation des vertèbres, un bon psychothérapeute a intérêt à devenir un expert de la modification de la perception subjective de son client. L’essence de son travail est la modification mentale et psychologique. Tout comme un chirurgien manipule un scalpel, un psychothérapeute manipule des symboles mentaux, des interprétations subjectives. C’est le coeur de leur art respectif, et ils l’appliquent tous deux dans un cadre déontologique précis.

C. Éthique de la P.N.L.

La question centrale de l’éthique revient donc à déterminer au service de qui s’applique cette compétence de manipulation plutôt que de savoir si les outils le permettent. Serait-ce au bénéfice du patient ou plutôt au bénéfice d’un escroc exploitant une personne crédule? Même si certains principes de la P.N.L. peuvent naturellement renforcer l’éthique de son utilisation – comme le fait de permettre au patient de définir précisément son objectif, qui lui permettra de reconnaître quand celui-ci est atteint, et donc de faire une évaluation indépendante de son thérapeute –, il n’en demeure pas moins que l’éthique est fonction de son utilisateur, de l’intention avec laquelle quelqu’un utilise une technique particulière, et non de la technique en elle-même. Il est parfaitement possible d’utiliser des techniques de communications mises en évidence par la P.N.L., tout comme de nombreuses autres approches, pour influencer des personnes à leur détriment. Certains politiciens ou certains experts ne s’en privent d’ailleurs pas ! Cela ne signifie pas pour autant que tous ceux qui utilisent ces techniques soient eux-mêmes malhonnêtes.

D. Influence culturelle

Aux USA dont provient la P.N.L., force est de constater que l’éthique ne fut pas le souci prédominant pour certains de ses fondateurs. Si Richard Bandler, considéré comme un des pères de la P.N.L., a eu une série d’intuitions proprement géniales, il est aussi, hélas, connu pour sa personnalité fortement rebelle. On pourrait déplorer que le manque de limites qui a fait son génie ait également contribué à empêcher la P.N.L. d’être intégrée en une approche qui serait totalement respectée socialement.

Depuis ces premières années, l’essentiel des développements ultérieurs de la P.N.L. a été produit par d’autres chercheurs, tels que R. Dilts, S & C Andreas, C. Faulkner etc. qui manifestent heureusement d’autres valeurs.

Les limites entre la science et l’activité commerciale sont également très différentes aux USA. Il est de pratique de plus en plus répandue d’y voir des chercheurs quitter l’université pour exploiter commercialement le produit de leurs recherches entamées au sein des universités. Le savoir y est considéré comme un produit et donc traité comme tel. Il suffit de voir les tentatives de breveter le génome humain pour en prendre conscience. La P.N.L., dont le développement a commencé à l’université de Santa Cruz en Californie, est née dans cet environnement culturel fort différent du modèle européen qui a tendance à distinguer totalement science pure et application commerciale. Les premières apparitions de la P.N.L. en Europe suivirent donc ce modèle culturel dont elle était une émanation. Par conséquent, l’Europe fut traitée comme un marché pour de simples produits de formation. Le contexte revenant plus à celui d’une transaction commerciale qu’à l’échange de savoir sur un mode universitaire européen, les universités européennes demeurèrent dans l’ignorance de ce qui ne semblait pas appartenir à leur monde.

Il est important de souligner ici que les personnes qui contribuèrent aux développements de la P.N.L. en Europe l’enrichirent de leur background culturel, y ajoutant une densité et une profondeur que la P.N.L. américaine ne présentait pas au départ et la distanciant de ses pratiques agressivement mercantiles.

E. Tournée vers le profit

Dans les pays francophones, la P.N.L. continua donc à croître en dehors des universités, principalement au sein d’instituts de formation et de recherche privés. Ceux-ci ne bénéficiant d’aucuns subsides, ils financèrent tout naturellement leur fonctionnement en faisant payer leurs formations. Ce coût des formations, contrasté à la gratuité de l’enseignement officiel, a souvent été caricaturé comme étant la finalité de la P.N.L., une preuve de son caractère mercantile et de son manque de sérieux. La plupart de ces instituts ont toutefois des structures juridiques classiques, dont la comptabilité est déposée et fait l’objet de vérifications fiscales comme n’importe quelle autre entreprise. Selon toute évidence, aucune n’a fait fortune jusqu’ici, la plupart n’assurant qu’à peine leur équilibre financier. La P.N.L. n’est en cela en rien différente d’autres méthodes psychothérapeutiques qui se sont développées en dehors d’un cadre universitaire, les formations à la psychothérapie se faisant de manière générales aux seins de structures extérieures à l’université. Dans ces structures, l’argent perçu est pour l’essentiel un moyen de continuer à assumer une mission plutôt qu’une finalité.

F. Insertion Sociale

La situation en France contraste avec celle de beaucoup d’autres pays d’Europe. Dans les pays scandinaves, la P.N.L. eut la chance d’être d’emblée acceptée et soutenue par les autorités universitaires et sanitaires. Il y a ainsi en Finlande plus de 400 psychothérapeutes P.N.L.istes dont les consultations sont remboursées par la sécurité sociale.

En Autriche, l’effort considérable développé sous l’impulsion de Peter Schutz par l’association autrichienne a mené la P.N.L. à une reconnaissance officielle sous sa forme psychothérapeutique. La situation est quasi-similaire en Angleterre.

En Belgique, la P.N.L. s’est développée au sein d’instituts privés largement ignorés des pouvoirs universitaires. L’Association belge de Psychothérapie se structurant progressivement, les P.N.L.istes belges ont décidés de joindre leur association à ce mouvement plus vaste qui s’inscrit dans la dynamique européenne. Notons au passage que la commission d’enquête parlementaire belge sur les sectes, qui définît avec beaucoup de rigueur sa méthodologie et ses critères, à aucun moment n’identifia la P.N.L. à une secte ou n’ajouta les instituts la pratiquant à la liste des mouvements sectaires. Les services formation de la région Wallonne ont décidé, après audit du fonctionnement d’instituts de formation P.N.L., de subsidier les formations données en leur sein.

En France, un groupe de réflexion s’est rencontré dès 1986 pour tenter de structurer la pratique et l’éthique de la P.N.L. aux delà des contingences financières et des aspects de concurrences entre grands instituts. Cette réflexion déboucha sur la naissance en 1989 d’une première association des P.N.L.istes (NLP.N.L.), Association Française des certifiés en P.N.L, aujourd’hui devenue Fédération Francophone des certifiés en P.N.L. Cette association continue son effort de clarification et de structuration du champ de la P.N.L. en France. Un Code de déontologie, des standards de formation ainsi que des conférences grand-public et un congrès annuel, ouvert aux autres champs disciplinaires, sont parmi ses productions sociales évidentes.

La discussion demeure vive au sein de la communauté des formateurs qui n’adhèrent pas tous à certaines des propositions et décisions récentes de la fédération. Les différents avis s’échangent librement au sein d’un « newsgroup » sur Internet, offrant un exemple de débat démocratique en action. Ces discussions enrichissent le travail déjà effectué afin de structurer une pratique éthique et responsable de la P.N.L. francophone indépendamment de tout enjeu financier. Elles visent également à favoriser la structuration du cadre conceptuel et le développement de la recherche.